Boltanski : notre avenir est-il démocratique?
Entendu le sociologue Luc Boltanski le 16/07 aux Rencontres de Pétrarque à Montpellier sur le thème « Notre avenir est-il démocratique ? ». Il concluait son propos par : « La cause de la critique est la cause de la démocratie », non pas une critique vaine ou incantatoire mais une critique qui se donne les moyens d’avoir prise sur le réel, qui se projette potentiellement dans l’action. Une sorte de définition négative de la démocratie qui ne dit pas : la démocratie, c’est ceci ou cela, des institutions, des règles, la séparation des pouvoirs, des droits fondamentaux, etc. Nécessaire mais insuffisant. L’Histoire a montré, montre encore, que les-dites « démocratie » couvent encore en elle ce qui les nie : les Etats-Unis c’est aussi Guantanamo, la torture officielle et l’Irak. Et qui soutiendrait longtemps qu’aujourd’hui en Europe nous participons effectivement du gouvernement du peuple pour le peuple ?
Et qui ne constate aussi la crispation des appareils policiers de nos « grandes démocraties » sur des enjeux dits stratégiques : répression des manifestants anti-nucléaires, des militants à ND des Landes, des étudiants au Canada, etc. Rappelons-nous aussi des manifestants aspergés à bout portant de gaz lacrymogènes en gare d’Anduze en janvier 2011 : le gradé a-t-il été radié, ou seulement sanctionné ? Non. Alors oui, la possibilité de cette critique dans l’espace public, critique ouverte, forte, même injuste, même de mauvaise foi, mais libre, c’est cela qui garantit notre liberté.
Quelques mots rapportés à notre territoire : combien de citoyens participent vraiment aux choix quotidiens comme aux grandes orientations pour notre canton? Une cinquantaine de personnes, en comptant large (sur 20 000 habitants) : les trois ou quatre élus les plus en vue de chaque commune et de la communauté de communes, autant de fonctionnaires (directeurs, membres de cabinet), quelques acteurs économiques (PDG des Salins, Listel, Yelloh, directeur de Port-Camargue, etc) et représentants des corps intermédiaires (syndicats, prud’hommie, associations).
Les élus communaux le sont sur de vagues programmes oubliés, l’opposition (même quand elle représente 63% de la population comme à A-M) est considérée comme une gêne inutile; quant à la communauté de communes, personne ne sait qui y est élu, comment et pourquoi. Depuis 2008, pas une seule décision qui n’ait été réellement délibérée avec la population, ni même ses représentants puisque les conseils municipaux sont de purs simulacres et chambres d’enregistrement.
Pas de répression ici bien sûr mais l’illustration concrète quotidienne de ce que nos institutions s’accommodent de pratiques foncièrement anti-démocratiques.
Un exemple parmi tant d’autres concernant A-M : aucun élu minoritaire ne représente la commune dans aucune instance extérieure quelle qu’elle soit : commission externe, syndicat mixte, conseil d’administration, association… Pourquoi? parce que le maire ne l’a pas voulu. La loi le permettait bien sûr mais il ne l’a pas souhaité, c’est tout.