Bandido mortelle : après la condamnation des élus du Grau-du-Roi

Deux élus du Grau-du-Roi ont été condamnés pour homicide involontaire pour la mort d’un spectateur lors d’une bandido. Enry Bernard-Bertrand et Jean Spalma sont condamnés à trois mois de prison avec sursis et à une amende de 1 000 € pour le premier et de 500 € pour le second.

Sans rediscuter le fond – qui a été jugé en appel – rappelons seulement que le juge n’a pas sanctionné le principe de la manifestation mais une imprudence commise par les organisateurs. Une erreur a-t-elle été commise? la réponse est oui. Si l’on ne commence pas par là on ruine sa propre défense. Un homme est-il mort? Oui encore : et l’on commence par faire silence et respecter la douleur de ses proches. Et leur colère.

Ceux qui se croient les meilleurs avocats de la cause des traditions en sont parfois les premiers fossoyeurs.

Dans un état de droit les décisions de justice se contestent par des voies légales, elles sont nombreuses et équitables, puis la chose jugée s’impose. Et d’abord et avant tout aux élus eux-mêmes qui incarnent l’autorité publique. Certains propos tenus par des chefs d’exécutifs locaux dans le cadre de leur fonction sont inadmissibles.

Les commentaires les plus fréquemment entendus, ou lus dans les pages du quotidien régional, sont proprement révoltants. Ils se résument en général à une proposition comme celle-ci : « Qu’est-ce qu’il faisait au milieu le vieux? C’est bien triste mais c’est tant pis pour cet inconscient qui met en péril nos traditions ».

Lire par exemple les commentaires après l’article Mort d’un homme pendant une bandido : deux élus condamnés en appel (Midi Libre, 04-05-2012)

Ces commentaires souvent nauséabonds consonnent bizarrement avec les derniers résultats électoraux : est-ce bien là le monde de la bouvine, confit d’idéologie rétrograde et de réflexes d’exclusion? Quelle honte, quelle tristesse!

J’aime passionnément ces animaux splendides, le noir de leur robe dans les prés, le souffle puissant du galop des bandido, la gaité de nos fêtes, l’insouciance partagée : souhaiter que tout cela perdure c’est admettre que les règles qui protègent et assurent la sécurité des citoyens dans toutes les situations de la vie courante soient clairement établies et appliquées avec une rigueur absolue. On lit dans l’entretien avec Reine Bouvier (Midi Libre, 14-05-2012) que le Syndicat pour la défense des traditions camarguaises a été créé en 1973 et qu’il « travaille sur un arrêté commun pour encadrer les abrivado et les bandido« . Pourquoi un tel retard? Car cette piste est effectivement la plus prometteuse : si l’on ne veut pas que d’autres règlementent cette activité dotons-nous volontairement et intelligemment des règles en adéquation avec les attentes de la société actuelle.

« On ne peut pas mettre des barrières sur tout le parcours », dit-on. Ben si, on peut. Reste à savoir si c’est la chose à faire par rapport au but que l’on se donne, c’est-à-dire assurer la sécurité des spectateurs. C’est cela qu’il faut discuter et cesser de répéter comme une formule vide « le risque zéro n’existe pas ».

Ce que l’on doit regretter dans le dernier jugement c’est la confirmation de la responsabilité pénale personnelle des deux accusés et non celle des élus en tant que tels. Je le déplore pour eux, et pour tous les bénévoles qui s’investissent dans l’organisation des fêtes et peuvent se sentir menacés. Raison de plus pour relancer la réflexion collective sur le déroulement des fêtes locales, et pas seulement celui des lâchers de taureaux.

Il faudra par ailleurs prévoir, et je m’y associerai, une opération de solidarité pour mutualiser le volet financier de la condamnation de Jean Spalma et Enry Bernard-Bertrand.

 

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